La SDSR et le racisme systémique : examiner les inégalités auxquelles sont confrontées les communautés de PANDC dans les établissements de santé canadiens

Pour comprendre les expériences et les résultats en matière de santé sexuelle et reproductive (SSR) des personnes autochtones, noires, et de couleur (PANDC) au Canada, il faut examiner de près les facteurs qui se recoupent et qui sont ancrés dans des politiques et des structures institutionnelles coloniales oppressives. La justice reproductive, telle qu’elle est décrite par divers érudit·es et organisations, souligne l’importance de tenir compte de multiples facteurs croisés tels que la classe, la race, le genre, la sexualité et l’accès aux soins de santé dans les expériences reproductives des individus. Elizabeth McGibbon, une chercheuse canadienne, souligne comment l’intersectionnalité et les structures de pouvoir systémiques existantes contribuent à de mauvais résultats en matière de santé pour les communautés de PANDC en établissant un lien entre le racisme et les déterminants sociaux de la santé.

En dépit d’une littérature bien établie soulignant les expériences négatives des femmes ANDC en matière de santé sexuelle et reproductive, le racisme systémique continue à être omniprésent dans les établissements de santé. Cela conduit à une sensibilisation insuffisante, à de la discrimination et à des préjugés implicites parmi les prestataires de soins de santé. Les préjugés implicites, définis comme des associations inconscientes et incontrôlables qui influencent les pensées et les actions, contribuent aux disparités dans la prestation des soins de santé. Par exemple, les préjugés raciaux implicites du personnel de santé peuvent entraîner le rejet ou le traitement inapproprié de la patientèle appartenant à des groupes raciaux spécifiques, ce qui exacerbe les inégalités en matière de SDSR.

De récentes études menées au Canada ont mis en évidence des cas récurrents de racisme subis par les populations racialisées qui recherchent et reçoivent des soins de santé, provoquant des sentiments de discrimination et de déshumanisation. Des exemples choquants de racisme médical, comme celui de Joyce Echaquan, mettent en lumière les conséquences désastreuses des préjugés systémiques au sein du système de santé. Les femmes noires et autochtones du Canada, en particulier, ont toujours été victimes de mauvais traitements, de négligence et de discrimination en matière de SDSR, ce qui a eu des répercussions néfastes sur leur santé.

La relation entre les femmes noires et le système de santé au Canada est complexe et caractérisée par une histoire de racisme et d’expérimentation médicale conduisant à la méfiance et à des expériences négatives en matière de SDSR. De même, les femmes autochtones continuent de subir des injustices en matière de procréation, notamment des stérilisations forcées et un accès limité aux services de SDSR. Les femmes incarcérées dans des prisons fédérales, dont une part importante et surreprésentée est autochtone, se heurtent également à des obstacles inconstitutionnels aux services de SDSR, perpétuant ainsi les traumatismes intergénérationnels et les disparités en matière de santé.

Pour remédier à ces échecs systémiques, il faut des politiques antiracistes qui vont au-delà de la formation aux compétences culturelles et reconnaissent le rôle des dynamiques de pouvoir inégales et du racisme quotidien dans le système de santé. Un cadre de justice reproductive, initié et orienté par des femmes de couleur, fournit une approche globale pour aborder les disparités en matière de SDSR en tenant compte des oppressions croisées et en plaidant en faveur de ressources et de justice sociale. Les prestataires de soins de santé doivent également reconnaître les conséquences historiques et actuelles de la colonisation, du racisme et de l’exclusion sociale sur l’état de santé des populations autochtones au Canada.

Pour que les communautés de PANDC puissent avoir confiance envers le système de santé canadien, la prestation des soins de santé doit être adaptée à la culture et les programmes doivent aborder les déterminants socioéconomiques qui influencent la SDSR. Il est essentiel d’accroître la représentation du personnel de santé autochtone, noir et racialisé dans les études sur la SDSR et dans les professions en santé afin d’obtenir des résultats équitables en matière de SDSR pour les communautés de PANDC. Ces personnes peuvent susciter des changements significatifs au sein du système de santé, en veillant à ce que toute la patientèle reçoive des soins respectueux, inclusifs et équitables en matière de SDSR.

La confiance envers le système de santé canadien repose sur plusieurs facteurs cruciaux. Il s’agit notamment de s’assurer que le personnel de santé est bien informé, qu’il dispense des soins adaptés à la culture et qu’il met en œuvre des programmes prioritaires visant à s’attaquer aux déterminants socioéconomiques affectant la santé sexuelle et reproductive. La reconnaissance des contextes historiques de l’esclavage des femmes noires, du colonialisme pour les femmes autochtones et du racisme actuel envers les femmes autochtones, noires et de couleur, ainsi que de leurs intersections avec les déterminants sociaux de la santé, est essentielle pour comprendre les inégalités qui conduisent à de mauvais résultats en matière de SDSR. 

Pour faire avancer efficacement les études sur la santé reproductive, il est impératif d’accroître la représentation des personnes autochtones, noires et racialisées parmi les sages-femmes, le personnel infirmier, les médecins et le personnel de recherche qui comprennent les effets potentiels du racisme systémique sur la santé des individus et des populations. En plaidant pour un changement au sein du système de santé, ces personnes peuvent promouvoir une SDSR équitable pour les communautés de PANDC, renforçant ainsi leur confiance envers le système de santé canadien.

À propos de l’autrice :
Leisha Toory est la fondatrice du Period Priority Project, directrice de la santé et des droits sexuels et reproductifs à la Table ronde des jeunes Canadiens sur la santé, et titulaire d’un baccalauréat en sciences politiques de l’Université d’Ottawa.

Publié:

mars 13, 2024


Auteur:

Leisha Toory


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