Les mutilations génitales féminines (MGF) sont l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme pour des raisons culturelles ou non médicales. Il s’agit d’une pratique profondément ancrée dans des systèmes socioculturels complexes qui perdurent depuis plus de deux mille ans.
À l’échelle mondiale, plus de 200 millions de filles et de femmes ont subi des MGF, avec des cas documentés dans trente pays situés principalement en Afrique, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud et en Asie. Les MGF entraînent des conséquences graves, dont la stérilité, l’infibulation et la désinfibulation, les infections, les traumatismes psychologiques et même la mort. L’UNICEF estime que dans le monde, plus de 3 millions de filles âgées de 15 ans et moins risquent chaque année de subir des MGF.
Malgré les interdictions légales dans la plupart des pays et l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies d’une interdiction mondiale des MGF, cette pratique persiste dans diverses communautés à travers les continents. Les MGF constituent une violation flagrante des droits de la personne des filles reconnus par de nombreux traités internationaux. Elles contreviennent aux principes fondamentaux d’égalité et de non-discrimination fondés sur le genre, au droit à la vie, au droit de ne pas subir de torture et au droit de jouir du meilleur état de santé possible.
Les MGF et la pauvreté
La corrélation entre les MGF et la pauvreté a fait l’objet d’études approfondies, révélant un lien très étroit avec le sous-développement dans les communautés où cette pratique persiste. Ce lien est solidement ancré dans l’omniprésence des disparités politiques, sociales et économiques entre les hommes et les femmes. Les efforts de lutte contre les MGF se sont concentrés sur deux stratégies principales : le renforcement du pouvoir et l’éducation.
Les initiatives en matière d’éducation favorisent la collaboration entre les autorités politiques et les responsables locaux afin de remettre en question les motifs discriminatoires qui sous-tendent les MGF, de modifier les normes culturelles néfastes, de renforcer le pouvoir des femmes et des filles, de sensibiliser aux risques, d’aborder les croyances religieuses, de lutter contre le secret et de plaider en faveur d’interdictions législatives dans les pays où les MGF sont légalisées. Le travail réalisé par des organisations telles que le réseau End FGM Canada et Amref Health Africa incarne ces efforts.
Le coût des MGF
Les MGF posent d’importants obstacles sociaux et économiques, en particulier dans les régions africaines où elles peuvent être liées à de longs rituels d’initiation, retardant ou empêchant l’éducation des filles. Les complications sanitaires et les traumatismes émotionnels liés aux MGF entraînent des absences fréquentes et une baisse de la concentration à l’école, ce qui entrave les progrès scolaires et peut provoquer un abandon précoce des études. Cela prive les filles de connaissances et d’opportunités essentielles, dont des informations sur la santé, la nutrition et les droits.
La pression sociale en faveur des mutilations génitales féminines découle de conceptions culturelles sur les conditions requises pour se marier et sur les gains économiques. Après avoir subi des MGF, les filles sont considérées comme étant bonnes à marier et apportent des avantages financiers à leur famille, tandis que les filles non excisées sont stigmatisées, considérées comme impropres au mariage, ce qui conduit à l’exclusion sociale et entraîne des conséquences financières. Cette pression, combinée au coût des cérémonies de mariage, pousse les familles à marier leurs filles tôt, ce qui entraîne des grossesses précoces et perpétue le cycle du désavantage.
Promouvoir l’accès des femmes au financement
Les femmes résidant dans les régions où les MGF sont les plus répandues sont confrontées à des obstacles disproportionnés en matière d’accès aux services financiers, ce qui les empêche d’améliorer leur situation et celle de leur famille. Le parcours des femmes entrepreneuses pour obtenir des services financiers est nettement plus ardu que celui des hommes. Les données suggèrent que dans les économies en développement, les femmes ont 20 % moins de chances de posséder un compte bancaire formel et 17 % moins de chances d’obtenir des prêts financiers formels que leurs homologues masculins.
Débloquer l’accès au crédit est extrêmement prometteur pour ouvrir des perspectives économiques aux femmes. Le renforcement du pouvoir économique des femmes est essentiel à la réalisation de l’égalité des genres et au respect des droits des femmes. Ce renforcement du pouvoir englobe divers aspects tels que l’égalité de participation aux marchés, le contrôle des ressources productives, l’accès à un travail décent, le contrôle de leur vie et une participation accrue à la prise de décision économique à tous les échelons.
Le renforcement du pouvoir économique des femmes joue un rôle central pour faire avancer le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et atteindre des objectifs tels que l’égalité des genres, la promotion du plein emploi productif, l’éradication de la pauvreté, la sécurité alimentaire, la bonne santé et la réduction des inégalités. Les MGF sont particulièrement liées à la lutte contre l’extrême pauvreté, car les filles qui y sont soumises courent un risque accru de mariage précoce forcé, de pauvreté persistante et de possibilités d’éducation limitées.
Pour atteindre ces objectifs, il faut mettre l’accent sur l’inclusion financière, qui se caractérise par la prestation de services financiers abordables, durables et de qualité aux personnes défavorisées. L’inclusion financière est largement reconnue comme une voie cruciale pour la réduction de la pauvreté et la croissance économique. Pour les victimes de MGF, qui sont souvent économiquement vulnérables et incapables de participer pleinement à l’économie, l’inclusion est particulièrement importante.
La lutte contre les MGF est menée sur plusieurs fronts, les initiatives locales de renforcement du pouvoir des femmes et d’éducation jouant un rôle essentiel. Si la sensibilisation et l’éducation sont indispensables, l’amélioration de l’accès des femmes aux ressources financières peut également constituer un outil précieux dans la lutte contre cette pratique néfaste.
Publié:
mars 27, 2024
Auteur:
Tonny Asiago Siekei, Doctorante et militante contre les mutilations génitales féminines et les mariages précoces
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