Le secteur de la santé mondiale a été un milieu inéquitable pour bien des personnes, en particulier pour les personnes qui ont été marginalisées par le système. Il a été invitant et sûr seulement pour les plus privilégiés : les personnes blanches, cisgenres et perçues comme des hommes et les personnes qui habitent dans les pays à revenu élevé. Que ce soit dans le milieu communautaire ou universitaire, la raison d’être du secteur de la santé mondiale est de bénéficier aux personnes qui ont été marginalisées au cours de l’histoire et de façon systémique (les communautés racisées, les personnes handicapées, les personnes de la diversité de genre, les populations des pays à faible revenu, etc.).
Comment pousser pour une réforme en santé mondiale? Voici quelques points sur les défis en santé mondiale soulevés par des conférencier·ière·s lors de la Conférence canadienne sur la santé mondiale 2022.
La conférencière d’honneur Abia Akram, du Pakistan, a appelé à l’adoption d’une approche intersectionnelle en santé mondiale. Elle a défendu les droits des femmes handicapées et parlé de leur lutte pour le respect de leurs droits les plus fondamentaux, y compris leur droit de recevoir des soins. Les femmes et les filles qui vivent avec des handicaps continuent de subir de la violence basée sur le genre. Abia Akram a abordé le besoin d’avoir des espaces inclusifs pour les personnes handicapées, notamment des rampes et des bâtiments accessibles. Elle demande « des appareils qui nous permettent d’être nous-mêmes sans avoir à changer ».
Dans le même ordre d’idées, le Dr Madhu Pai a appelé à un changement des personnes mises au « centre de l’attention » en santé mondiale. Pour le citer : « la santé mondiale est centrée sur les personnes comme nous, et il est là le problème ». Pendant sa présentation, le Dr Pai a rapporté que 70 à 80 % des subventions de recherche en santé mondiale sont octroyées à des personnes qui habitent dans des pays à revenu élevé comme le Canada, et que ce sont toujours les chercheurs et chercheuses de ces pays qui sont les plus publiés. Le Dr Pai a appelé à la justice en santé mondiale et à l’abandon des paradigmes du sauveur et de la charité.
Cela étant dit, à quoi ressemble la justice en santé mondiale? La séance plénière intitulée « Stories for Change: Realizing Indigenous Maternal Child Health » (Raconter le changement : pour une santé maternelle et infantile autochtone) a permis de mettre en lumière certains des principes du changement. Les conférencier·ière·s de la séance, la Dre Alexandra King, Cheryllee Bourgeois, la Dre Karen Lawford, Norma Rabbitskin et le Dr Samir Shaheen Hussain, ont parlé des disparités en matière de santé auxquelles sont confrontées les communautés autochtones. Ils ont notamment insisté sur la nécessité, pour les prestataires de soins de santé, de se faire les alliés des communautés autochtones; sur la nécessité de pratiquer la décolonisation et de promouvoir les solutions et les connaissances issues des communautés autochtones; sur l’importance d’enseigner l’histoire des oppressions qu’elles ont vécues; et sur le recours à une approche de soins qui tient compte des traumatismes en santé maternelle et infantile. Il est primordial que nous apprenions des communautés autochtones, car ce sont elles les expertes.
Pendant l’événement, j’ai eu l’occasion de présenter un projet qui s’intitule « Family and Caregiver Insights on Early Psychosis in India and Canada », dirigé par la Dre Srividya Narayanan Iyer de l’Université McGill. Certains des points saillants de ce projet en ce qui concerne l’équité dans les travaux en santé mondiale sont (1) l’importance de la création de partenariats avec des chercheurs et chercheuses des pays à revenu faible et moyen; et (2) l’importance d’avoir une équipe de recherche composée de personnes aux expériences de vie diverses.
Les chercheurs et chercheuses en santé mondiale des pays à revenu élevé doivent reconnaître l’immense apport de leurs homologues des pays à faible revenu. Pour rendre le secteur de la santé mondiale inclusif et équitable, nous devons établir des relations mutuellement bénéfiques avec les communautés avec lesquelles nous travaillons et nous devons leur donner l’autonomie qui leur revient sur les travaux qui sont réalisés.
À propos de l’autrice :
Hani Rukh-E-Qamar est la fondatrice du Canadian Advisory of Women Immigrants (CAWI), une initiative communautaire dédiée au renforcement du pouvoir des femmes immigrantes. Elle étudie actuellement au baccalauréat en psychologie avec une double mineure en géographie de la santé et en développement international à l’Université McGill, où elle participe également à un programme de recherche en santé mondiale pour les étudiants de premier cycle (McGill Global Health Scholars). Dans le cadre de ce programme, Hani a collaboré à un projet sur les facteurs familiaux et les psychoses en Inde et au Canada. Par ailleurs, elle siège au Comité directeur des Femmes canadiennes en santé mondiale de l’Association canadienne pour la santé mondiale (ACSM). L’été dernier, Hani a été assistante de recherche pour le groupe de travail en santé maternelle (Maternal Health Task Force) de la Harvard T.H. Chan School of Public Health. Elle est également co-présidente du Groupe de travail jeunesse du Partenariat canadien pour la santé des femmes et des enfants (CanSFE).
Hani a reçu plusieurs récompenses pour son travail, y compris le Prix Scarlet Key de l’Université McGill et le Prix des Champions de la santé mentale de l’Alliance canadienne pour la maladie mentale et la santé mentale. Elle a également été finaliste du Top 25 Canadian Immigrant Award. Ses travaux ont déjà été mentionnés dans les nouvelles, en particulier son travail auprès des femmes et des filles immigrantes dans le secteur des organismes à but non lucratif. Cette année, Hani a participé à la Commission de la population et du développement à titre de déléguée de la jeunesse canadienne. De plus, Hani est passionnée par la recherche et le travail communautaire portant sur l’accès équitable aux soins de santé, les déterminants sociaux de la santé et les droits des immigrants et des réfugiés. Joignez son réseau sur LinkedIn.
Publié:
janvier 20, 2023
Auteur:
Hani Rukh-E-Qamar
Catégories:
Partager cette publication: