Ce que nous avons entendu : Semaine de l’égalité des sexes 2023

La Semaine de l’égalité des sexes est l’occasion de réaffirmer notre engagement à faire avancer l’égalité des genres et de sensibiliser au travail qui doit encore être accompli. Pour marquer cette importante semaine, le CanSFE a tenu une série de trois webinaires en septembre afin de faire ressortir quelques-uns des problèmes les plus pertinents et difficiles à résoudre ainsi que des possibilités concrètes de les aborder et de les surmonter. Pendant trois semaines, 300 personnes se sont inscrites à la série pour apprendre auprès de spécialistes et échanger de bonnes pratiques sur divers sujets, tels que les interventions humanitaires transformatrices en matière d’égalité des genres, le travail de soins non rémunéré et la violence fondée sur le genre facilitée par la technologie (VFGFT). Voici un résumé de ce que nous avons entendu.

Les enregistrements des séances sont accessibles sur le site Web du CanSFE. Pour en savoir plus sur une séance ou entrer en contact avec une intervenante, veuillez contacter Deborah Dahan à [email protected].

Ce que nous avons entendu : Intégrer l’égalité des genres et les approches transformatrices en matière de genre à l’action humanitaire

Ce que nous avons entendu : Le travail de soins non rémunéré en tant que cause et conséquence de l’inégalité des genres : l’impact sur l’éducation des femmes et des filles

Ce que nous avons entendu : La violence fondée sur le genre et facilitée par la technologie (VFGFT) : Outils et bonnes pratiques pour « ne pas nuire »


Intégrer l’égalité des genres et les approches transformatrices en matière de genre à l’action humanitaire

Le 13 septembre, le CanSFE a réuni des spécialistes de l’égalité des genres (ÉG) dont le travail consiste à fournir des conseils sur les programmes transformateurs en matière d’égalité des genres (TÉG) en contexte humanitaire. Ensemble, elles ont présenté des outils pratiques et des recommandations sur la manière de mieux intégrer l’ÉG dans les interventions humanitaires. En outre, elles ont expliqué pourquoi la réponse humanitaire, tant nationale qu’internationale, se doit d’être transformatrice en matière d’égalité des genres. 

  • Le « pourquoi » : souligner l’importance d’intégrer l’égalité des genres (ÉG) et les approches transformatrices en matière d’égalité des genres (TÉG) dans les interventions humanitaires 

Les inégalités de genre sont souvent exacerbées en situation de crise. Ne pas tenir compte de l’ÉG dans la réponse humanitaire augmente le risque de négliger les besoins des personnes les plus vulnérables à l’impact des crises, ce qui risque de les rendre encore plus vulnérables. Par conséquent, les interventions humanitaires doivent aller au-delà des besoins immédiats et concrets, et chercher à répondre aux besoins stratégiques afin de mieux soutenir la capacité d’action et le renforcement du pouvoir des femmes et des filles, en veillant à ce que l’aide ait un impact durable. 

  • Le « quand » : saisir l’occasion

L’utilisation des approches TÉG permet de s’attaquer aux inégalités et aux pratiques nuisibles en vigueur. Elle favorise également la capacité d’action et le pouvoir décisionnel des femmes et des filles. En période de perturbation ou de crise, les rôles liés au genre et la dynamique du pouvoir peuvent changer. Cela peut être l’occasion de créer un programme ciblé qui facilite et soutient le renforcement du pouvoir des femmes, et lui accorde une place centrale. Lorsque les crises passent à la phase de reconstruction, des plateformes de discussion sur les lois et les systèmes de gouvernement apparaissent. Cela donne l’occasion de s’assurer que des voix historiquement exclues sont invitées à la table pour participer activement à la prise de décision. Cela permet également de s’assurer que les questions relatives aux inégalités et à l’évolution des normes sont abordées, et que les capacités et les compétences de la communauté touchée par la crise sont reconnues et intégrées à la réponse et à la planification à long terme.

  • Le « quoi » : la mise en pratique 

Il est essentiel de travailler à tous les niveaux : au niveau individuel pour renforcer les actifs socioéconomiques et les filets de sécurité, au niveau communautaire pour aborder les normes, les attitudes et les pratiques en matière de genre qui peuvent être nuisibles, et au niveau institutionnel/gouvernemental pour s’assurer qu’il existe des lois, des politiques, des services et des budgets en place qui promeuvent l’ÉG et l’inclusion. Les programmes devraient également travailler dans le cadre du lien entre le développement, l’aide humanitaire et la consolidation de la paix afin de favoriser une approche intégrée qui tient compte à la fois des besoins à court et à long terme. C’est particulièrement important en ce qui concerne le financement, la planification et le recensement des parties prenantes/partenaires. Cela permet de planifier des interventions transformatrices en matière d’ÉG dès leur début et dans le cadre d’un continuum. En outre, nous devons veiller à ce qu’une optique intersectionnelle soit appliquée par le biais d’une inclusion significative des membres de la communauté, non seulement avant et pendant les catastrophes, mais aussi au cours du processus de rétablissement. La recherche et la collecte de données constituent un autre élément essentiel pour garantir une meilleure intégration de l’ÉG dans les interventions humanitaires. Une des intervenantes a donné une présentation approfondie au sujet des opportunités et des défis liés à l’utilisation des données pour l’intégration de la dimension de genre dans l’action humanitaire. Pour accéder à la présentation, cliquez ici.

  • Le « comment » : surmonter les difficultés 

L’intégration significative de l’ÉG dans les programmes signifie également qu’il faut tenir compte de la nature des défis à relever. Parmi ces défis, citons les budgets limités, les priorités des donateurs qui ne considèrent pas nécessairement l’égalité des genres comme une action vitale, les cycles de financement plus courts qui ne tiennent pas compte des longs délais nécessaires au suivi du changement en matière d’ÉG, les capacités limitées des organisations et la disponibilité restreinte des spécialistes de l’ÉG. Par ailleurs, les crises et les catastrophes dans le monde pèsent sur les finances mondiales, accentuant le sentiment de concurrence entre les priorités et la pénurie, ce qui est encore plus vrai pour les interventions transformatrices en matière d’égalité des genres qui sont très pointues. 

  • Tourner l’objectif vers soi : examiner le contexte national 

Au Canada, l’ÉG est moins bien comprise et privilégiée dans les interventions d’aide en cas de catastrophe, car l’accent continue d’être mis sur les besoins concrets. Cette discussion n’a pas vraiment eu lieu à l’échelle gouvernementale et n’a pas été adoptée en tant qu’approche systématique sur le plan national, comme nous l’avons vu dans le cadre de la réponse à la COVID-19. Malgré le renforcement des cadres politiques et des intentions concernant l’importance d’une meilleure intégration de l’ÉG dans les interventions de secours en cas de catastrophe, on constate toujours un manque de cohérence dans l’ensemble du pays. Cela s’explique notamment par le fait que les mesures d’urgence sont dictées par des mandats qui ne privilégient pas l’ÉG. Dans notre pays, nous avons la possibilité d’accroître l’ambition et le budget, d’investir dans des conseiller·ères/spécialistes en matière d’ÉG et de dispenser davantage de formations afin de garantir au minimum l’intégration d’une perspective d’ÉG dans les interventions humanitaires canadiennes. 


Le travail de soins non rémunéré en tant que cause et conséquence de l’inégalité des genres : l’impact sur l’éducation des femmes et des filles

Le 20 septembre, le CanSFE a réuni un groupe de spécialistes internationaux pour analyser l’impact du travail de soins non rémunéré sur l’accès des femmes et des filles à l’éducation, et explorer les intersections entre l’ODD 5, l’égalité des genres, et l’ODD 4, l’éducation inclusive et de qualité pour tout le monde. 

  • Le fardeau des soins en fonction du genre 

Les inégalités entre les genres au sein de l’économie des soins sont courantes, les femmes et les filles assumant de manière disproportionnée la charge des soins dans les secteurs formel et informel. Si la répartition du travail de soins varie au cours des cycles de vie et a évolué au fil du temps, il est essentiel de reconnaître l’influence des normes de genre dans la définition des rôles et des responsabilités des femmes et des filles. Par exemple, les stigmates sociaux peuvent décourager les hommes d’assumer des tâches de soins parce qu’ils se soucient de la perception qu’auront d’eux leurs pairs. Les femmes et les filles se heurtent donc à des obstacles importants lorsqu’il s’agit de participer à la vie politique, à l’emploi, à la vie sociale et à l’éducation.

  • Intersections entre l’économie des soins et l’éducation

Les responsabilités en matière de soins interfèrent de diverses manières avec la capacité des femmes et des filles à accéder à l’éducation. Il existe différents obstacles externes et internes, tels que le rôle des détenteurs d’obligations, qui dépeignent le travail de soins comme une responsabilité incombant principalement aux femmes et aux filles, et qui veillent à ce que davantage de ressources soient consacrées à l’éducation des garçons, ce qui a souvent pour effet d’exclure ou de limiter les filles quant à ces possibilités d’éducation. D’autres obstacles sont la pauvreté et les difficultés économiques qui peuvent conduire les familles à retirer les filles de l’école pour les faire travailler comme domestiques. En outre, le manque d’accès aux services de santé et droits reproductifs (SDSR) entraînant des grossesses non planifiées a également été mentionné comme un obstacle à l’éducation résultant des responsabilités en matière de soins. Lorsque les femmes doivent jongler entre les soins et l’éducation, la nature de l’établissement, la flexibilité des programmes et les infrastructures mises à leur disposition, telles que les salles d’allaitement, ou les politiques institutionnelles qui permettent aux femmes de reprendre leurs études après avoir décroché ou après une grossesse, sont autant d’éléments qui contribuent à l’accès aux études et à leur poursuite. 

  • Reconnaissance, réduction et redistribution du travail de soins 

Parmi les stratégies clés pour aborder ces questions, les panélistes ont examiné des moyens de créer des environnements favorables pour transformer les normes de genre qui ont une incidence sur la part disproportionnée des femmes dans les tâches de soins. Il s’agit notamment de travailler avec les détenteurs d’obligations morales et avec les hommes pour faire évoluer les mentalités concernant l’accès des femmes à l’éducation ainsi que leur accès à des secteurs non traditionnels tels que le commerce non traditionnel. L’importance de la représentation a également été au cœur de la discussion, soulignant l’influence des exemples et des modèles positifs. Il a été souligné que lorsque les filles rencontrent des femmes qui ont poursuivi des études et assumé des rôles sortant de la sphère traditionnelle des soins, cela les aide à envisager un avenir au-delà du mariage et de la maternité précoces. En outre, la force des exemples peut également contribuer à combattre les préjugés auxquels les hommes se heurtent lorsqu’ils tiennent compte de leur propre rôle et de leur participation au travail de soins. 

Les stratégies visant à résoudre ces problèmes doivent être multidimensionnelles et intersectorielles. C’est pourquoi il faut travailler davantage non seulement à l’échelle communautaire, mais aussi à l’échelle institutionnelle, afin de créer une approche multidimensionnelle pour lutter contre les effets négatifs de l’économie des soins sur les femmes et les filles. Lorsque les femmes n’ont d’autre choix que d’assumer le travail de soins, les établissements peuvent mettre en place des mécanismes pour les aider à poursuivre leurs études, par exemple des services de garde et des salles d’allaitement. 

En outre, cette discussion a fait ressortir la nécessité de plaider en faveur de la reconnaissance, par les établissements d’enseignement et les employeurs, du travail de soins et des compétences acquises dans le cadre de ce travail. À cette fin, la collecte de données peut être essentielle pour attribuer une valeur économique au travail de soins des femmes, car elle peut soutenir les efforts visant à parler de l’impact et de la valeur du travail de soins et de l’ampleur de sa contribution à l’économie. 

  • Étude de cas : Un centre d’allaitement et de garde d’enfants sur le campus comme moyen de favoriser l’égalité des genres dans l’accès à l’EFTP au Kenya


La violence fondée sur le genre et facilitée par la technologie (VFGFT) : Outils et bonnes pratiques pour « ne pas nuire » 

Le 27 septembre, le CanSFE a réuni des spécialistes pour discuter de stratégies, d’outils et de meilleures pratiques pour aborder et prévenir la VFGFT. Tout au long de cette séance, les intervenantes ont abordé différentes perspectives sur la manière de combler le fossé numérique entre les genres et de privilégier la capacité d’action des femmes dans les espaces en ligne tout en veillant à leur protection.

  • Pourquoi la VFGFT est-elle un enjeu important?

Si l’espace numérique a changé la donne pour ce qui est de faire avancer l’égalité des genres et le renforcement du pouvoir, il a également engendré pour les femmes, les filles et les personnes issues de la diversité de genre de nouvelles façons de subir de multiples formes de violence et d’exclusion. La VFGFT constitue un défi unique en raison de son ampleur et de l’anonymat des personnes qui la pratiquent, ce qui favorise l’impunité et la persistance indéfinie des agressions en ligne. En outre, les agressions commises en ligne tendent à être mal comprises et interprétées comme n’étant pas aussi nuisibles que la violence physique, ce qui a une incidence sur la capacité des survivant·es à les signaler. 

L’évolution constante du paysage numérique a également une incidence sur la manière dont les prestataires de services peuvent aider les victimes de VFG, car ils doivent désormais intégrer la technologie dans l’évaluation des risques et la planification de la sécurité. Par exemple, les refuges doivent faire face à des menaces telles que la divulgation de données personnelles (l’action ou le processus de recherche et de publication sur Internet de renseignements privés ou permettant d’identifier une personne ou un lieu en particulier), qui met en péril la sécurité des résidentes et la capacité du refuge à fonctionner. En outre, de nouvelles questions doivent être abordées pour assurer la sécurité des survivant·es. Il faut par exemple s’assurer que les médias sociaux et les comptes bancaires des survivant·es sont à l’abri des agresseur·euses et que les mots de passe sont changés pour garantir la sécurité, ou encore se pencher sur l’utilisation de dispositifs de repérage qui perpétuent la violence en permettant aux agresseur·euses de traquer et de harceler les survivant·es. 

  • Trouver le juste milieu

L’accès aux espaces en ligne est crucial, notamment pour accéder à des informations essentielles. Lorsque vous travaillez avec des communautés qui n’ont pas accès aux technologies numériques, il est important d’avoir des conversations qui favorisent l’accès aux outils numériques et leur utilisation positive, tout en sensibilisant les gens et en veillant à ce que des mesures de protection contre les risques leur soient enseignées. C’est là que deviennent cruciales les notions d’autosoins numériques et de prise en charge de notre vie numérique. Il est également important de reconnaître la réalité des survivant·es de VFGFT qui ne veulent pas retourner sur les plateformes en ligne après y avoir subi des agressions et du harcèlement. En ne leur offrant pas un espace numérique sûr et en les poussant ainsi à quitter cet espace, nous les isolons davantage au lieu de responsabiliser les agresseur·euses, les outils ou les plateformes. 

  • Intégrer la VFGFT dans le vaste travail de lutte contre la VFG

La VFGFT et la VFG ne peuvent pas être considérées comme des questions distinctes : la VFGFT est une forme de VFG et découle directement de ce qui se passe hors ligne et qui se reproduit désormais à l’aide de nouveaux outils et de nouvelles plateformes. Pour lutter efficacement contre la VFGFT, il est essentiel d’examiner le grand contexte systémique de la VFG et de reconnaître que les causes profondes de la violence en ligne et hors ligne sont les mêmes. Ce sont les mêmes systèmes d’oppression, les mêmes normes patriarcales, la même dynamique de pouvoir et les mêmes concepts concernant le genre et la diversité des genres qui favorisent le développement d’une société où cette violence à l’égard des femmes peut exister. Par conséquent, les solutions pour lutter contre cette violence doivent être abordées tout au long du continuum de la VFG. Par exemple, puisque la VFG commence souvent en ligne, mais s’intensifie hors ligne, la technologie numérique et la participation aux espaces en ligne doivent être intégrées dans les programmes, l’éducation et les efforts de sensibilisation en matière de VFG. 

Cela permet également d’approfondir la réflexion sur la manière dont les espaces en ligne peuvent être utilisés pour prévenir la VFG et favoriser l’éducation et le soutien aux survivant·es au moyen de communautés en ligne. L’espace numérique est également devenu une plateforme permettant aux communautés marginalisées de se mobiliser et de renforcer leur capacité à lutter contre la violence et les agressions, en leur redonnant un rôle à jouer et une capacité d’action sur leur vie. 

  • Outils et recommandations 

Les intervenantes ont formulé de nombreuses recommandations pour lutter contre la VFGFT et la prévenir. Elles ont notamment parlé de la nécessité de poursuivre l’éducation à la culture numérique et la sensibilisation à la VFGFT ainsi qu’à l’impact de la technologie sur l’égalité des genres, ainsi que de la nécessité de s’attaquer aux causes profondes de la violence en ligne et hors ligne, telles que les dynamiques de pouvoir qui touchent tout particulièrement les femmes et les filles. Elles ont également souligné la nécessité d’une approche multisectorielle. Les gouvernements, les organisations de la société civile et le secteur privé doivent travailler ensemble si l’on veut obtenir des changements significatifs dans ce domaine. Sur le plan politique, nous devons plaider en faveur de politiques qui reconnaissent la VFGFT non seulement comme faisant partie du continuum de la VFG, mais aussi comme ayant un impact tout aussi grave et dommageable que la violence physique. Les entreprises technologiques privées doivent privilégier la sécurité des utilisateurs finaux et des utilisatrices finales lorsqu’elles développent de nouveaux outils et tenir compte des besoins particuliers des femmes, des personnes issues de la diversité des genres et des communautés racialisées qui subissent le plus de violence et de haine dans les espaces numériques. Alors que nous nous efforçons de prévenir la VFG à l’échelle systémique, nous devons également soutenir les survivant·es aujourd’hui en nous assurant que les prestataires de services disposent des connaissances nécessaires pour aider les survivant·es de la VFGFT ou qu’ils et elles sachent où se procurer ces informations. Par exemple, les prestataires doivent savoir comment préserver au mieux les preuves numériques, comment effacer les empreintes numériques, comment effacer l’historique d’un navigateur lorsque les survivant·es demandent de l’aide, etc. En outre, les intervenantes ont souligné l’importance de créer des espaces communautaires sûrs pour permettre aux survivant·es d’accéder à un soutien, notamment en cessant de les blâmer pour ce qu’ils ou elles ont vécu. 

Ressources complémentaires : 

https://securitetech.ca

https://securitetech.ca/resources/toolkits

https://www.suziedunn.com/resources

https://bcsth.ca/technology-safety-project-resources/

Publié:

octobre 16, 2023


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