Rapport sur les résultats de la conférence Après-2020 du CanSFE

Rapport sur les résultats de la conférence Après-2020 du CanSFE

RÉSUMÉ

La conférence « Après-2020 » du CanSFE d’avril 2018 a rassemblé des chefs de file du pays et du monde entier pour : 1) discuter et apprendre des 10 dernières années du Canada en matière de programmes de santé en vertu de l’engagement de Muskoka, 2) faire le bilan de la situation en ce qui concerne la résolution des principales lacunes et 3) façonner la manière dont le leadership canadien en matière de développement et de santé des femmes et des enfants progressera après 2020. Compte tenu du passé et de nos accomplissements, les milliards de dollars investis par le Canada au cours des 10 dernières années ont contribué à sauver et à améliorer la vie de millions de femmes et d’enfants dans des centaines de collectivités dans le monde entier. Plus récemment, les efforts visaient essentiellement à combler les principales lacunes au sujet de la santé sexuelle et génésique et des droits connexes. Toutefois, des difficultés et des lacunes subsistent encore, et dans la conférence, ainsi que dans le présent rapport, on se concentre principalement sur les pivots requis des intervenants canadiens en matière de développement international et d’égalité entre les sexes afin de mettre en œuvre au mieux la Politique d’aide internationale féministe et d’accélérer les progrès en vue d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD), en particulier les ODD 3 et 5.

 Sept thèmes clairs sont ressortis des travaux de la conférence :

  1. L’approche sexotransformatrice comme base. Les approches sexotransformatrices doivent être intégrées comme élément central de notre travail, des programmes aux politiques, en passant par les données, les recherches, la défense des droits et les partenariats. Une approche sexotransformatrice oriente les programmes et les politiques qui tentent de redéfinir les rôles des femmes et des hommes en matière d’égalité entre les sexes et qui cherchent à transformer les relations inégales entre les sexes afin de promouvoir le partage des pouvoirs, le contrôle des ressources, la prise de décisions et le soutien à l’autonomisation des femmes[1].
  2. Approche intégrée. L’amélioration de la santé ne se limite jamais à la prestation et aux services de soins de santé; à l’aide d’une approche axée sur le cycle de vie, nous devons collaborer entre secteurs et tenir compte des facteurs critiques ayant une incidence sur la santé en général, y compris les contextes sociaux, politiques et culturels dans lesquels vivent les femmes et les enfants.
  3. Atteindre les personnes les plus vulnérables et difficiles à atteindre. En partant d’une approche fondée sur les droits de la personne qui considère que chaque vie a une valeur égale à celles des autres, nous devons opter pour autre chose que « la solution facile » pour faire des progrès pour tous.
  4. Changement institutionnel et systémique. Pour avoir un impact prolongé et généralisé, nous devons élargir notre travail sur les projets et les programmes, en les enrichissant et en les intégrant à des stratégies qui institutionnalisent la transformation permanente à tous les niveaux – individuel, organisationnel, communautaire, national et international.
  5. Impact et données. Nous devons en finir de simplement déclarer nos activités et nos résultats aux donateurs et commencer à voir nos efforts comme faisant partie d’un projet mondial visant faire des progrès vis-à-vis des ODD et d’autres structures internationales.
  6. Partenariat féministe. Une approche féministe du partenariat signifie un changement conceptuel. On ne voit plus les gens comme des clients ou des bénéficiaires, mais plutôt comme des partenaires de l’organisme et des partenaires de la réussite collective. Cette approche demande d’être à l’écoute de la population et des organisations locales et de les impliquer de façon significative en tant que leaders.
  7. Défense des droits et volonté politique. La défense des droits est essentielle pour s’attaquer aux causes profondes – obstacles systémiques, juridiques ou institutionnels – de la mauvaise santé. Nous devons donner aux communautés touchées les moyens de s’engager dans cette défense des droits, et en particulier d’autonomiser les jeunes.

La mise en œuvre de la Politique d’aide internationale féministe et la réalisation des ODD sont des défis collectifs, et tous les acteurs jouent un rôle différent. Les thèmes présentés dans le présent rapport représentent un changement transformationnel de l’approche, des activités et du financement. Le CanSFE est impatient de travailler avec ses membres et ses partenaires pour relever collectivement le défi. De façon générale, le CanSFE, en tant que plateforme d’échange de connaissances et de partenariat, constitue un moyen efficace de renforcer notre capacité collective grâce à des webinaires, à la coordination à l’échelle nationale, à des groupes de travail, et plus encore. De plus, la campagne d’engagement public #CanadaEnTête lancée récemment et la Coalition canadienne pour la santé mondiale entraîneront d’importants nouveaux apprentissages et feront passer notre message au public canadien. D’autres moments précis pour faire avancer ces conversations et discuter de mesures concrètes comprennent la présidence du Canada au G7, la Conférence canadienne sur la santé mondiale de 2018 et la conférence Women Deliver de 2019.

INTRODUCTION

La conférence « Après-2020 » du CanSFE d’avril 2018 a réuni des chefs de file nationaux et internationaux afin de façonner la manière dont le leadership canadien en matière de développement et de santé des femmes et des enfants se déroulera après 2020. Pendant deux jours, les délégués ont discuté de la façon dont le leadership canadien en matière d’égalité des sexes et de santé des femmes et des enfants accélérera les progrès vers l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD). Les délégués ont fortement insisté sur le fait que le statu quo est insuffisant et que des changements s’imposent tant au Canada qu’à l’international pour atteindre les ODD. Ils ont vu la présidence du Canada au G7 et l’accueil de la conférence Women Deliver de 2019 comme des moments clés du leadership. Les délégués ont insisté sur la nécessité de relier nos efforts nationaux, en particulier pour améliorer la santé des Autochtones, à notre travail à l’étranger. « Si nos collectivités ne fonctionnent pas, le monde ne fonctionne pas et vice versa. C’est le programme universel »[2]. Les participants ont également souligné la nécessité pour l’approche du Canada de tenir compte de l’évolution du paysage mondial au cours des 20 prochaines années, y compris l’impact des changements climatiques, l’augmentation des conflits et l’explosion démographique des jeunes. À la suite de ces discussions, sept thèmes clés ont été dégagés.

Le présent rapport sur les résultats rassemble des analyses quantitatives et qualitatives des groupes de discussion, des conférenciers et des discussions. Il a également été éclairé par une séance spécifique sur les résultats qui a examiné en profondeur le document de travail préparatoire à la conférence. Ce rapport vise à susciter des discussions et des changements au sein du secteur et à éclairer le rôle du Canada dans l’action collective requise pour réaliser les ODD au pays et partout dans le monde, conformément à la Politique d’aide internationale féministe du Canada (PAIF).

THÈME : FONDEMENT DE L’APPROCHE SEXOTRANSFORMATRICE

Il est essentiel de s’attaquer aux normes discriminatoires parce que le pouvoir de décision est primordial pour la santé des adolescentes. Dominique LaRochelle, Aide à l’enfance – Canada

La prise en compte de l’égalité entre les sexes est essentielle à tous les aspects de la santé mondiale. Ne laissez personne vous dire le contraire. Michelle Dowling, SickKids Centre for Global Child Health

Les participants à chaque séance ont insisté sur le fait que les approches sexotransformatrices doivent être intégrées comme élément central de notre travail, des programmes aux politiques, des données à la recherche et de la défense des droits aux partenariats. Une approche sexotransformatrice est la meilleure façon d’atteindre les ODD et de mettre en œuvre la PAIF. Les participants ont également mentionné qu’ils considéraient l’approche sexotransformatrice comme une innovation en soi. L’innovation n’a pas besoin d’être technologique – il peut s’agir d’une innovation dans nos politiques, nos approches et nos programmes. Les participants ont reconnu qu’il s’agissait de conversations difficiles, qui entraîneront des changements d’approche fondamentaux et des changements internes au sein des organisations. Ils ont parlé du fait que le Canada est bien placé pour s’attaquer aux enjeux difficiles, y compris la santé sexuelle et génésique et les droits connexes, grâce à une approche sexotransformatrice.

La plupart des participants ont indiqué que les normes sociales, la culture et la dynamique du pouvoir étaient les principales causes du mauvais état de santé et de l’accès limité aux soins de santé. En particulier dans les séances sur les soins prénataux, l’avortement et la santé et les droits sexuels et reproductifs (SDSR), la capacité de décision des femmes et des filles a été mise en évidence comme étant essentielle. « Nous ne pouvons pas simplement donner une méthode de contraception à une femme et supposer qu’elle pourra l’utiliser »[3]. Le choix est limité par le manque d’information, d’éducation, d’autonomie et d’habilitation. La honte et la stigmatisation associées à la santé des femmes constituaient également un thème prédominant, qui évoquait la nécessité pour les organisations de travailler en étroite collaboration avec des groupes et des dirigeants de la communauté locale afin de mieux comprendre et de faciliter le changement des normes, mythes et stéréotypes préjudiciables au moyen d’une approche sexotransformatrice. Plusieurs conférenciers ont souligné la nécessité pour une approche sexotransformatrice d’inclure également les communautés sexuelles non binaires, ainsi que les difficultés particulières qui leur sont propres.

Les participants à chaque séance ont également insisté sur le fait que, au-delà des femmes et des filles, une approche sexotransformatrice doit mobiliser les contrôleurs du processus décisionnel et ceux qui suivent ou qui perpétuent des normes sexuelles préjudiciables. Pour que les communautés puissent donner aux femmes et aux enfants les moyens de défendre leur propre santé et leur bien-être, les hommes et les garçons, les belles-mères, les dirigeants communautaires et religieux, les fournisseurs de soins de santé et les médias doivent être intégrés en tant que champions et alliés.

THÈME : APPROCHE INTÉGRÉE

Nous avons besoin d’approches intégrées et complètes, et non de sélection sélective. Il n’y a pas de cadre conceptuel linéaire qui permettra d’atteindre nos objectifs. Nous devons partir du point de convergence – la fille ou la femme, dans une famille, une communauté et un pays. (Traduction) Caroline LeClerc, Affaires mondiales Canada.

Chaque groupe a souligné les conséquences d’une approche sexotransformatrice sur les programmes de santé, en précisant que l’amélioration de la santé ne peut pas être uniquement une question de prestation et de services de soins de santé, mais qu’elle doit également tenir compte d’autres facteurs essentiels ayant une incidence sur la santé en général, comme l’eau, l’hygiène et l’assainissement, la nutrition, les mariages précoces et forcés d’enfants et l’éducation. Cette réalité met en évidence la nécessité d’une approche intégrée et multisectorielle pour améliorer la santé des femmes et des enfants, en intégrant une approche axée sur le cycle de vie, et alignée sur l’ODD 3 pour « assurer une vie saine et promouvoir le bien-être de tous à tous les âges ». Les participants ont fait remarquer que cette démarche s’applique au Canada, en particulier pour les communautés autochtones, ainsi que dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

Les panélistes ont parlé des intersections souvent compliquées dans leur travail et de la meilleure façon d’atteindre les objectifs indiqués dans la PAIF en abordant également les facteurs influant sur la santé qui sont à l’origine d’une mauvaise santé. Par exemple, pour améliorer l’hygiène menstruelle, il faut s’occuper des toilettes des écoles; la violence interpersonnelle est un facteur de risque clé des naissances avant terme; pour améliorer la santé des adolescents, il faut s’attaquer aux mariages précoces et forcés et aux mariages d’enfants; et les mères instruites et autonomes sont plus susceptibles d’avoir la capacité de prendre des décisions pour vacciner leurs enfants. Les participants ont également parlé de l’importance de ne pas considérer la SMNE et la SDSR comme des silos, mais plutôt de les intégrer largement à la santé et au bien-être des femmes et des enfants.

THÈME : ATTEINDRE LES PERSONNES LES PLUS VULNÉRABLES ET DIFFICILES À ATTEINDRE

Tous s’inquiétaient du fait que nos efforts collectifs n’atteignent pas les personnes les plus vulnérables et marginalisées, un aspect clé des ODD et de la PAIF, et que c’est le cas tant au pays qu’à l’étranger. Plusieurs séances ont permis de cerner la question des « fruits à portée de la main » et du fait que les iniquités en cours sont souvent masquées par des données moyennes qui considèrent certains progrès comme des progrès pour tous.

Les participants ont parlé de la nécessité d’une approche fondée sur les droits, selon laquelle la vie de chacun est égale. Cette réalité est également ressortie clairement des séances où il a été question des enjeux dans les collectivités autochtones. On a beaucoup mis l’accent sur les besoins particuliers des plus pauvres, des plus marginalisés et vulnérables et des plus difficiles à atteindre. La plupart des séances ont reconnu les différences entre ces groupes et ont mis l’accent sur une approche différenciée pour déterminer les besoins de chacun, les atteindre et mesurer les projets. Cette approche différenciée tient compte du fait que l’atteinte des plus pauvres et des plus marginalisés coûte plus cher et exige des discussions sur le financement du développement.

THÈME : CHANGEMENT INSTITUTIONNEL ET SYSTÉMIQUE

Au cours de nombreuses séances, les participants ont parlé du fait que le changement systémique et institutionnel est essentiel pour réaliser des améliorations plus profondes, plus vastes et plus résilientes de la santé et des systèmes de santé. Parmi les exemples de conversations, mentionnons le renforcement des capacités pour la collecte de données au niveau des pays, le renforcement des systèmes de santé et la gestion de la chaîne d’approvisionnement pour un accès accru à la vaccination. Les participants ont reconnu qu’une grande partie de notre travail collectif s’est concentrée sur l’individu ou le ménage, et qu’il reste du travail à faire pour modifier les systèmes de santé, par exemple, travailler à l’atteinte d’un objectif commun des régimes universels de soins de santé – l’une des cibles de l’ODD 3. Comme l’explique Khalil Shariff d’AKFC, « nos projets devraient contribuer à un réseau et un système cohérents »[4].

Afin de mettre en œuvre la PAIF, nous devons miser sur nos projets et programmes, dans le but d’avoir une incidence sur les niveaux institutionnel et systémique. Par exemple, l’éradication de la poliomyélite est une réussite ponctuelle, mais la réduction de la mortalité infantile est un défi constant et permanent qui nécessite des solutions et des structures constantes et permanentes. Les projets limités dans le temps et axés sur les résultats peuvent devenir fragmentés et temporaires s’ils ne font pas partie d’une stratégie cohérente de transformation permanente, guidée par les ODD et d’autres cadres. Bien qu’ils aient reconnu l’énormité du défi, les participants ont convenu que cette transformation vers un développement durable et systémique était également nécessaire dans les contextes vulnérables et de conflit.

THÈME : IMPACT ET DONNÉES

L’utilisation des données pour produire un plus gros impact positif a été relevée comme un défi clé auquel le secteur est confronté dans l’adoption d’une approche sexotransformatrice et la mise en œuvre de la PAIF. Les participants ont discuté de la nécessité de passer des activités de production de rapports à l’établissement d’un lien entre nos activités et l’impact au moyen d’une théorie du changement fondée sur des données probantes. Les participants ont indiqué que la mise en œuvre de la PAIF signifie une meilleure compréhension de la façon dont les extrants mènent aux résultats, et pas seulement dans le cadre de projets particuliers, mais aux niveaux infranational, national et régional. Cette démarche nécessite une nouvelle perspective, pour passer de l’objectif de déclarer les résultats ou les activités uniquement aux donateurs, à plutôt considérer nos efforts comme une composante d’un projet collectif mondial afin de réaliser des progrès au titre des ODD et d’autres cadres internationaux. Comme les représentants d’Affaires mondiales Canada l’ont dit, il ne s’agit pas seulement de montrer à quel point nous réussissons, mais aussi de contribuer à l’effort global.

À cette fin, les panélistes ont souligné que nous devons établir des objectifs non seulement pour chaque programme, mais aussi pour tous nos travaux. Nous ne réussirons pas si nous ne définissons pas d’abord le travail, pour ensuite faire la collecte des données et établir des points de contrôle nous permettant de rectifier le tir au besoin. Par conséquent, nous devons être agiles et prêts à changer de cap avec les bons outils, non seulement au niveau des projets, mais aussi au niveau infranational et national.

Une table ronde sur « l’utilisation des données pour éclairer les décisions » a approfondi les défis associés à une meilleure utilisation des données pour influencer l’impact. Elle a entre autres relevé la nécessité :

  • d’aligner les indicateurs normalisés pour suivre les progrès de la PAIF sur les cibles et indicateurs des ODD et de l’OMS.
  • d’améliorer les données sur les personnes les plus vulnérables et les plus difficiles à atteindre. Une grande partie de l’exclusion qui nous préoccupe est cachée par des données moyennes. À cette fin, nous avons besoin de données ventilées selon le sexe et d’autres facteurs qui se recoupent.
  • de travailler ensemble pour renforcer les systèmes nationaux de collecte de données entre les régions, les provinces et les comtés. Les données aux niveaux infranational et infranational peuvent être irrégulières, de sorte que nous n’avons pas une vue d’ensemble complète de ce que nous atteignons (ou n’atteignons pas).
  • de tenir compte du fardeau que les besoins de données imposent aux partenaires et aux fournisseurs locaux, et de cerner les occasions où nous pouvons travailler plus intelligemment et plus efficacement, ou de chercher un soutien et un financement supplémentaires.
  • d’équilibrer les données quantitatives et qualitatives. Les données qualitatives s’attaquent au « pourquoi » derrière les chiffres et nous aident à comprendre les normes sexospécifiques, les inégalités sociales et les causes profondes de la mauvaise santé.

THÈME : PARTENARIAT FÉMINISTE

La plupart des participants, y compris Affaires mondiales Canada, ont insisté sur l’incidence d’une approche féministe du partenariat. Les relations inégales ne sont pas féministes, et les conférenciers ont souligné la nécessité de tenir compte du privilège dont jouissent de nombreux Canadiens, ainsi que de l’héritage colonialiste du Canada lorsque nous travaillons chez nous et dans les pays du Sud.

Les panélistes ont expliqué qu’une approche féministe du partenariat, comme le décrit la PAIF, suppose une transition conceptuelle, pour passer d’une perspective où l’on considère les gens comme des clients ou des bénéficiaires, à une perspective où l’on voit les gens comme des partenaires actifs de l’organisme et des partenaires dans la réussite collective. Cette approche demande d’être à l’écoute de la population et des organisations locales et de les impliquer de façon significative en tant que leaders. Pour ce faire, il faut inclure les voix marginalisées dans tous les aspects du travail, des politiques aux programmes, en passant par la défense des intérêts et la recherche. Il faut aussi voir les jeunes comme des leaders d’aujourd’hui et investir dans leur travail. En s’associant à des participants locaux et nationaux pour diriger notre travail collectif, ils sont plus susceptibles de s’approprier les programmes et les résultats, ce qui aboutit finalement à un plus grand succès.

Un certain nombre de panélistes ont déclaré que le Canada doit contribuer aux approches locales, nationales et internationales fondées sur des données probantes, échanger des connaissances et partager des apprentissages entre les projets, les donateurs, les régions et les pays.

Les participants ont souligné que pour passer au développement durable, il faut considérer les solutions comme développées et possédées par la communauté et le pays. Les donateurs et les responsables de la mise en œuvre doivent se considérer comme des contributeurs aux efforts menés par les pays. Comme l’a dit Khalil Shariff, de la Fondation Aga Khan du Canada, cette démarche nous oblige à passer d’un changement externe à des réseaux de changement locaux qui apprennent les uns des autres dans un contexte et une culture particuliers. Nous ne pouvons pas le faire à moins d’établir des partenariats avec des organisations locales et de les financer. Un certain nombre de présentateurs ont souligné que nous devons pour ce faire adapter notre tolérance à l’échec et au risque.

THÈME : DÉFENSE DES DROITS ET VOLONTÉ POLITIQUE

Les obstacles à l’inclusivité sont toujours enracinés dans la discrimination.

Sarah Kennell, Action Canada pour la santé et les droits sexuels

La plupart des participants ont parlé de la nécessité d’investir davantage dans la défense des droits comme moyen essentiel de renforcer les approches sexotransformatrices. Ils ont indiqué que la défense des droits était particulièrement essentielle pour éliminer les obstacles systémiques, juridiques et institutionnels qui sont à l’origine des problèmes de santé. Dans certains cas, les changements que le Canada s’est engagé à apporter ne peuvent être réalisés que par des activités de défense des droits qui stimulent la demande et génèrent une volonté politique. Les conférenciers ont souligné la nécessité d’habiliter les communautés touchées à participer à cette défense des droits, en soulignant le pouvoir particulier des voix des jeunes.

La défense des droits a été soulignée comme particulièrement importante pour les conférenciers afin d’assurer des soins et des services de santé aux groupes les plus pauvres, les plus marginalisés ou les plus victimes de discrimination, y compris les communautés LGBTQ+. La marginalisation n’est jamais accidentelle ou individuelle. Elle est le résultat de politiques, de lois et de pratiques délibérées, ce qui fait que la défense des droits est une stratégie intégrale pour atteindre les plus vulnérables et marginalisés.

Lorsque les participants ont parlé de la nécessité d’accroître le financement, ils ont établi un lien direct entre la question et la défense des intérêts et la volonté politique, tant au Canada que dans les pays où les membres du CanSFE travaillent. Sans stimuler la demande dans le pays par la défense des droits, il est peu probable que nous obtenions la volonté politique d’augmenter les ressources nationales ou l’aide publique au développement pour combler les lacunes prioritaires relevées par les participants. Plusieurs conférenciers ont souligné l’importance des campagnes de mobilisation du public, afin d’accroître la compréhension des Canadiens à l’égard des ODD et du développement, et d’obtenir un vaste appui du public pour le travail des membres du CanSFE et de l’ensemble de la communauté canadienne de la santé mondiale. Un aspect clé de l’établissement de ce soutien est la capacité de communiquer facilement les résultats du travail des membres afin de pouvoir expliquer clairement aux Canadiens la valeur et l’incidence de la PAIF sur la vie des femmes et des enfants dans le monde.

CONCLUSION – PRINCIPAUX POINTS À RETENIR ET PROCHAINES ÉTAPES

La mise en œuvre de la PAIF est un défi collectif, et chacun joue un rôle différent, des chercheurs et des universitaires aux équipes de programmes, en passant par les experts en santé, les organismes de défense des intérêts, les gouvernements et le secteur privé. Les thèmes présentés dans ce rapport représentent un changement d’approche transformateur pour faire progresser la santé, les activités et le financement des femmes et des enfants. Voici quelques-unes des principales leçons tirées de la conférence, comme en témoignent les thèmes décrits ci-dessus :

  1. Le Canada a l’occasion de jouer un rôle de leadership en démontrant l’impact des approches sexotransformatrices afin de faire avancer les ODD en matière de santé et de participer à des enjeux de programmes difficiles et délicats, et il est motivé à le faire.
  2. La clé des approches sexotransformatrices est de revoir la nature des partenariats, afin de les rendre plus équitables et ancrées dans des principes féministes. Les donateurs et les responsables de la mise en œuvre doivent se considérer comme des contributeurs aux efforts menés par les pays.
  3. Pour réaliser le potentiel des données, nous devons en faire plus pour tirer profit de cet outil, pas seulement pour la production de rapports, mais aussi pour assurer un impact positif constant, axé sur les communautés et les personnes les plus défavorisées. Nous devons également collaborer avec nos partenaires pour renforcer les systèmes de données au niveau des pays afin de soutenir la prise de décisions continue.
  4. Dans tout ce que nous faisons, nous devons éliminer la compartimentation de nos zones de travail, en utilisant une approche axée sur le cycle de vie pour veiller à ce que le tableau complet et le contexte de la santé et du bien-être d’une personne soient primordiaux.
  5. Les ODD présentent un programme universel, et nous devons faire notre part pour nous assurer que des progrès sont réalisés dans toutes les collectivités, tant au Canada que dans le monde entier.
  6. Pour apporter et ancrer un changement durable, nous devons faire plus attention à la conception de systèmes et d’institutions et nous engager à effectuer le travail de défense des droits nécessaire pour appuyer cet objectif.

De nombreuses occasions nous attendent pour faire avancer les résultats de la conférence, et le CanSFE est impatient de collaborer avec ses membres, associés et partenaires, à mesure que nous relevons collectivement le défi de la mise en œuvre de la PAIF.

Voici les occasions à venir et en cours de collaboration soutenue :

  • Poursuite du soutien à l’Initiative de la planification de l’avenir, qui vise à autonomiser 18 millions d’adolescentes et de jeunes femmes dans les communautés les plus vulnérables du monde.
  • Appuyer la présidence canadienne du G7, y compris le thème « Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes » et le travail du Conseil consultatif sur l’égalité des sexes. La présidence française du G7 en 2019 pourrait également présenter des occasions de faire progresser les thèmes présentés dans ce rapport.
  • La Conférence canadienne sur la santé mondiale (du 19 au 21 novembre 2018), organisée par la Société canadienne de santé internationale et avec CanSFE comme partenaire principal, est un moment à venir pour les organisations de la société civile (OSC), les praticiens et les chercheurs canadiens et internationaux qui se réuniront et continueront de faire progresser notre programme collectif.
  • La conférence Women Deliver de 2019 présente une occasion en or de leadership canadien à l’intersection de l’égalité des sexes et de la santé mondiale. Le CanSFE participe activement à la direction de la participation des OSC canadiennes à la conférence. Il convient de souligner que les thèmes qui ressortent de la conférence Après-2020 du CanSFE correspondent bien aux résultats publiés récemment de la tournée de consultations de Women Deliver
  • Comme nous l’avons mentionné ci‑dessus, une partie de notre travail consiste à mobiliser le grand public canadien, et la campagne de mobilisation du public #CanadaEnTête lancée récemment vise essentiellement cet objectif. Les organisations et les particuliers peuvent participer à cette campagne dirigée par le CanSFE et ses organisations membres.
  • Compte tenu de l’énorme impact potentiel et de la possibilité de trouver des solutions aux défis urgents en matière de données sur la santé mondiale et l’égalité entre les sexes, le projet dirigé par la Coalition canadienne pour la santé mondiale, dirigée par le CanSFE, a récemment été lancé et accepte les propositions de financement jusqu’à la fin de juin.
  • Grâce à son travail d’échange de connaissances, le CanSFE organise régulièrement des webinaires et des réunions en collaboration avec les membres et les partenaires sur divers sujets. Notre travail continu avec AMC pour convoquer les organisations canadiennes qui travaillent en Haïti fait partie de nos réussites récentes.

Bien qu’il s’agisse d’un jalon important, la conférence Après-2020 n’est qu’un pas dans la voie menant à un monde où chaque femme et chaque enfant survit et s’épanouit. La collaboration, l’innovation et l’engagement continus sont essentiels, et le CanSFE se réjouit d’être un chef de file actif et un partenaire dans ce cheminement.

En partenariat avec Affaires mondiales Canada

[1] ONU Femmes https://trainingcentre.unwomen.org/mod/glossary/view.php?id=36&mode&lang=fr

[2]  John McArthur, Brookings Institution

[3]  Colleen Keilty, Plan International Canada

[4]  Khalil Z. Shariff, Fondation Aga Khan Canada

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